Question (2010)

Bonjour, bonsoir
Je voulais vous écrire car j’ai besoin de parler…

Déjà, je suis fatiguée. Je suis lasse. J’ai même carrément la flemme. La flemme de quoi ? Je ne sais pas… de vivre ? De continuer dans ce monde pourri, détruit ? Oui… ça doit être ça, et tellement d’autres choses encore.
Ensuite, je me déteste. Oui, je me déteste profondément. Je déteste mon corps, je déteste mes pensées, ma voix, mes mots, mon comportement, bref…

En fait, depuis le divorce de mes parents il y a deux-trois ans, j’ai l’impression de devenir de plus en plus… amer. Oui, je suis devenue… méchante, jalouse, égoïste, agressive, ridicule. J’en ai conscience, donc on pourrait dire que c’est bien, que je ne suis pas aveugle et effrontée… mais c’est aussi horrible. J’assiste à tout ce que je fais, tout ce que je dis, tout ce que je pense, et j’en ai terriblement honte mais je ne peux rien faire. Enfin je peux peut être faire quelque chose mais je suis trop faible pour ça. Toutes mes gaffes, mes blagues ratées (oui ça peut paraître insignifiant mais ça fait partie d’une longue liste de petits trucs comme ça qui me touche beaucoup), tous les petits moments embarrassants qui me ruinent la journée me trottent tout le temps dans la tête. C’est comme un coup de couteau dans le ventre.
Je me sens tellement à côté de la plaque. J’ai l’impression de passer à côté de tout… J’en ai marre de tout. Je suis… lasse.
J’ai l’impression que tout ça n’a pas de sens. Vraiment… j’ai pas envie de continuer… c’est une paresse constante.

Cette année, je me sens vraiment très mal dans ma classe, les gens m’agacent, ils font du bruit, ils disent des choses délirantes, ils sont immatures et complètement inconscients de ce qui se passe autour d’eux, ça me rend dingue. Heureusement j’ai trois amis proches. Mais surtout, je prépare cette année un examen d’entrée dans un conservatoire de danse à horaires aménagés. Donc je fais des cours en plus, je vais voir des spectacles, enfin bref… ça m’occupe et ça me sauve du fardeau des cours. Mais ça m’apporte aussi tellement de stress. J’ai peur de me dégonfler… je me compare tellement aux autres filles qui sont fines, ou qui ont de belles formes définies, musclées et souples… je suis tellement fragile psychologiquement… j’ai peur… Heureusement je pourrai retenter l’examen l’année prochaine si je ne le réussis pas cette année, mais ma mère a payé tellement de cours, de spectacles, d’abonnements… si je n’y arrive pas… ça ne va qu’empirer mon stress et ma culpabilité. Je lui en suis infiniment reconnaissante bien évidemment mais justement… je ne veux pas la décevoir.

Je me sens si seule… je ne peux parler à personne parce que j’ai l’impression d’être folle. Je n’arrive même pas à comprendre ce que je pense… même si je ne demande pas aux autres de me comprendre (car ce n’est pas possible et normal), m’écouter doit être un peu difficile. Je m’agace tellement… mais tellement. J’en peux plus. Je suis fatiguée. Même si j’ai un ami qui est très à l’écoute et qui est d’ailleurs le seul à savoir que je ne vais pas très bien (enfin… bien sûr il ne sait pas tout…) je me sens… juste… décalée. Qu’est ce qu’il ne va pas chez moi ? Tout m’énerve… tout me touche…
Je ne sais pas ce que je suis…

Vous voyez, en cours tout le monde me prend pour la fille intello, sympa mais un peu gênante… qui rit un peu bêtement, et qui fait un peu pitié. À la maison, je discute politique, avenir, et rêves avec ma mère. À la danse, je me sens bien. Même si… je déteste tellement mon corps… je me sens bien.

Seulement… peu importe où je suis…. Je fais la gueule. Oui… je suis connue pour faire la gueule. Mais avant je n’étais pas comme ça…… je me déteste !!!!!!!!!! J’en peux plus de moi !!!!! Tout le monde me dit « arrête de faire la gueule » oui mais j’y arrive pas !!! Je me déteste, je déteste le monde, je suis fatiguée, je suis à bout, je ne sais plus quoi faire, je sais qu’il faut que je parle à quelqu’un mais je ne sais pas à qui, je ne sais pas quand, et si c’est à un professionnel, je ne sais pas avec quel argent et surtout comment le demander à mes parents.

J’aimerais tellement être ce genre de personnes qui arrivent à sourire quoi qu’il se passe… Je vois tout le temps ça sur les réseaux « les personnes les plus courageuses sont celles qui sourissent alors qu’elles vont mal » ouais bah moi je suis pas ce genre de personnes. « La confiance en soi est une force de caractère » oui bah je l’ai pas cette force. Je suis faible et lâche. Ok. Ça, j’avais compris…

Tout n’est que contradictions dans ma tête. Tout le temps… C’est n’importe quoi… c’est fatiguant…
Enfin bref… merci beaucoup pour votre écoute et désolée pour ce long message
À bientôt peut être

Réponse

Au travers de ta question, tu exprimes ton mal-être actuel, tu questionnes son origine/sa cause et tu demandes de l'aide.

En te lisant, nous ne voyons pas la personne que tu décris. En te lisant, nous devinons une jeune femme pleine de compétences et de qualités. Tu t'exprimes très bien, tu es capable d'introspection, tu as différents intérêts, tu sais discuter de différents sujets, tu es capable de t'investir dans une activité qui te plait, tu sais apprécier l'art et la culture.

Parallèlement, nous sommes conscient·e·s que les qualités et les compétences n'empêchent pas toujours les jugements négatifs sur soi-même. Même les personnes incroyablement douées ou celles qui correspondent le plus aux critères de beauté, peuvent se juger extrêmement sévèrement.

As-tu déjà remarqué que le jugement que l'on porte sur soi-même est toujours plus négatif que celui que l'on porte sur les autres ? As-tu déjà remarqué que quand l'on se compare aux autres, on compare toujours ce que l'on aime le moins chez nous avec ce que l'on trouve de mieux chez les autres ?

Nous t'invitons donc à ne pas te juger plus négativement que tu le ferais avec d'autres personnes. Et pour renforcer ton estime de soi et ta confiance en toi, nous te proposons de lire les articles sur l'estime de soi que tu trouveras en annexe. Tu y trouveras des conseils concrets pour booster ton estime de soi.

Si les réseaux sociaux disent qu'une personne courageuse est celle qui sourit alors qu'elle va mal, alors nous ne sommes pas du même avis. La démarche que tu fais en écrivant cette question est très courageuse. Il faut du courage et de la force pour prendre conscience qu'on ne va pas bien, pour le dire et pour chercher de l'aide et du soutien.

Concernant la cause de ton mal-être et de ta grande fatigue, nous pouvons te proposer quelques pistes de compréhension.

D'après ce que nous comprenons, tes parents ont divorcés au tout début de ton adolescence. L'adolescence est en soi une période de grands changements et de grands bouleversements. Ceux-ci ne sont pas forcément négatifs, mais ils bousculent beaucoup et ils ont tendance à fragiliser l'estime et la confiance en soi. Dans ton histoire à toi, il y a au même moment un autre grand changement, celui du divorce de tes parents.

Toute ta vie d'enfant (toi, ton corps, ta vie familiale...) a changé rapidement, c'est donc un changement immense. Ton état émotionnel est peut-être une réponse à tous ces changements que tu n'as pas forcément souhaités.

Par ailleurs, l'adolescence et tous les changements pubertaires qui l'accompagnent fatiguent énormément. Ta grande fatigue peut donc être à la fois physique et émotionnelle/psychologique.

Concernant la dimension physique, c'est avec ta·ton pédiatre qu'il serait utile d'en parler. Il est aussi possible que tu aies besoin de certains compléments alimentaires ou d'autre chose qui t'aide à te sentir moins épuisée.

Concernant la dimension émotionnelle (psychologique), il pourrait effectivement être précieux d'en parler avec un·e personne professionnelle de la santé psychique. Dans le cadre scolaire, tu peux t'adresser aux professionnel·le·s comme les l'infirmier·ère·s scolaires, les médiateur·trice·s scolaire, la·le travailleur·euse scolaire ou même à un·e prof en qui tu as confiance.

Nous t'encourageons aussi vivement à en parler à tes parents. Iels pourront te soutenir et t'aider à trouver des solutions. Peut-être pourraient-ils accepter que tu consultes un·e psychologue en dehors de l'école. Le coût des consultations est pris en charge par l'assurance de base. Tu trouveras plus d'informations dans l'article ci-dessous.

Pour terminer, nous tenons à te rassurer sur tous ces petits moments embarrassants (gaffes, blagues ratées...) que tu décris. Il est très probable qu'ils ne soient pas perçus comme tels par ton entourage. N'oublie pas que ton regard n'est pas le leur.

Ne reste pas seule, parles-en sans trop attendre. Parfois, le simple fait d'en parler aide à se sentir plus légère.

Nous espérons que cette réponse te donnera quelques pistes de réflexions utiles, n'hésite pas à revenir sur ciao.ch si ce n'était pas le cas, ou si tu as plus de questions.

Bien à toi !

L'équipe ciao.ch


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Dernière modification le 10 février 2025

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